Notre environnement direct se mondialise et nous sommes confrontés à des cultures différentes de la nôtre. Mais savons-nous toujours reconnaître ce qui dépend de l'individu et ce qui dépend de l'appartenance ? Et qu'est-ce qu'une culture ? Qu'en déduire pour communiquer efficacement ? Et surtout qu'est-ce que ça change que je sache si tel comportement dépend de l'individu ou de son appartenance, sa culture, son entreprise ou que sais-je encore ?
Et bien, ça change tout ! En vous méprenant sur un comportement, vous allez, dans un contexte multiculturel que vous ne maîtrisez pas encore, déduire des généralités et des règles qui seront, pour partie, erronées donc non-aidantes !
Comme le montre l'image de 6 qui est un 9 vu sous un autre angle, tout est affaire de point de vue. Pour comprendre le monde qui nous entoure vite et bien, nous suivons un processus neurologique en 3 phases : perception → interprétation → évaluation. Ce processus induit un comportement. Pour rester en vie depuis l'époque des cavernes, ce processus se déroule en moins d'une seconde dans 99% des cas. En effet, nous ne pouvons pas nous reposer toujours la même question à chaque situation comme si nous la découvrions pour la première fois. Pour nous permettre de réagir vite, notre cerveau utilise une grille de lecture pré-construite composée de valeurs hautes (par exemple, liberté, indépendance, santé) et de valeurs basses : les critères d'évaluation. Pour aller vite à l'essentiel, c'est-à-dire au comportement adapté, notre cerveau procède par sélection, distorsion et généralisation. Sélection : car nous ne retenons de ce que nous percevons que ce que nous avons choisi de percevoir. Distorsion : lecture de pensée, équivalence "X = Y", relation de causalité "Si X alors Y" et présuppositions. Généralisation : par les jugements universels, les adverbes de généralisation (toujours, tous, jamais, rien) et les règles personnelles généralisées à soi (comme je suis français, je ne peux pas parler d'argent facilement...) ou aux autres (comme ils sont américains, ils peuvent parler d'argent sans hésitation...).
Mais alors en quoi le contexte interculturel change-t-il la donne ? Une fois passée la barrière de la langue, n'a-t-on pas affaire aux mêmes mécanismes qu'on parle à son conjoint, son voisin ou un étranger ?
En fait, le contexte interculturel remet en quelque sorte les compteurs d'apprentissage à zéro. Tout l'apprentissage contextualisé qui est le vôtre est remis en cause. Lorsqu'on en prend conscience, le risque est alors de se tromper et de catégoriser comme "culturel" tous les comportements que vous ne comprenez pas chez quelqu'un d'une autre culture que la vôtre.
Pour éviter de généraliser et de vous tromper, il est important de déterminer si le comportement que vous ne comprenez pas est individuel ou culturel. En fait, il s'agit même de déterminer ce qui, dans ce comportement, est individuel et ce qui est culturel car il est probable qu'il y ait un peu des deux en même temps.
D'ailleurs, de quelle culture parle-t-on ? Il est tentant de tout mettre sur le "dos" de la culture nationale : "les chinois sont comme ceci", "les italiens comme cela". Mais il suffit d'avoir mis les pieds dans un hôpital pour y avoir constaté qu'il y a une une culture administrative et une culture des professionnels de santé. Et que dire de la culture des personnels médicaux et de celles de personnels soignants ? D'ailleurs, ne peut-on pas parler de culture des internes, des urgentistes, des pharmaciens, tous personnels médicaux ?
Dans un contexte habituel, chacun a développé des généralisations, distorsions et sélections aidantes... à l'usage. Mais dans un contexte multiculturel et, a fortiori, à l'étranger, il est tentant de se débarrasser du problème en généralisant les comportements que nous ne comprenons pas sous le vocable de l'altérité culturelle . Et pourtant, cela ne servira à rien pour prendre une décision adaptée ou communiquer efficacement.
Alors faut-il tout connaître du pays ou de la culture de son interlocuteur ? Non bien sûr, il faut surtout savoir reconnaître ses propres processus de sélection, de généralisation et de distorsion afin de se poser les bonnes questions :
- Me manque-t-il une information ? L'information est-elle trop vague ?
- Qu'est-ce qui me fait dire cela ? Qu'est-ce qui me prouve que X = Y ? Est-ce que X peut vouloir dire autre chose ?
- "Jamais" vraiment ? Vraiment "tout le monde" ? Quand cela a-t-il été différent ? Y a-t-il des cas différents ?
Je vais donner un exemple personnel.
J'ai été 3 ans entre 2011 et 2014, à Tokyo, membre du comité de direction d'une filiale d'un grand groupe industriel japonais comptant 1500 salariés. J'avais la charge du développement commercial international et une équipe de 11 collaborateurs japonais directs. Habitué à gérer des équipes commerciales en Europe et ayant comme critère qu'un commercial efficace doit être en clientèle, j'ai été surpris de constater que les commerciaux rentraient au bureau entre chaque visite, ce qui rendait techniquement presque impossible de faire plus de 2 visites par jour. Qu'en déduire ? Que les commerciaux japonais sont inefficaces ? La vraie question est "comment en arrivé-je à ma déduction" ? Ai-je généralisé ? Tous les commerciaux rentrent-ils vraiment entre chaque rendez-vous ? Y a-t-il des jours ou des cas où ils ne le font pas ? Avant d'en déduire quelque chose, me manque-t-il une information ? Que font les commerciaux au bureau et quel est le rapport avec leur travail ? Dans le contexte, qu'est-ce qui me fait dire que le fait que les commerciaux soient beaucoup au bureau est inefficace ? Au contraire, ai-je cherché à comprendre ce que les commerciaux font au bureau et qui est important pour leur travail ?
Une autre manière d'aborder ce cas serait de vous dire pourquoi les salariés japonais ont besoin d'être au bureau plus longtemps que les salariés européens. Mais cette approche aurait 2 inconvénients :
- elle ne serait pas reproductible car limitée au cas des salariés japonais et ne fonctionnerait donc pas pour d'autres contextes culturels ;
- elle serait elle-même une généralisation car ce qui est vrai pour certaines entreprises japonaises n'est pas vrai pour toutes.
Voilà pourquoi, il est essentiel de travailler sur ses propres processus cognitifs, ses valeurs et croyances, ses critères et ses propres biais de distorsion, généralisation et sélection pour être efficace dans un contexte multiculturel.
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